Monuments patriotiques du Souvenir aux Morts pour la France
Honneur aux résistants polonais morts à La VERSANNE (Loire)
La France entretient avec la Pologne, son premier partenaire en Europe centrale, des relations denses, fruit de l’histoire et d’une tradition, illustrée par plusieurs vagues successives d’émigrés polonais en France : la dernière en date fut celle des nombreux sympathisants de Solidarnosc pendant la période de l’état de siège des années 1980. (extrait sur le Web)
Mais l’Histoire de l‘Amitié Franco-Polonaise remonte maintenant à plusieurs siècles. C’est ce qui explique pourquoi, lors du dernier conflit mondial (1939-1945), après la capitulation de l’Allemagne nazie, la France a pesé de tout son poids diplomatique auprès de ses alliés, pour que la Pologne retrouve la majeure partie de son territoire.
Mais cette seconde guerre qu’on qualifiait de « mondiale » a causé la perte de plusieurs dizaines de milliers de civils et militaires polonais, dont une grande partie, tombée aux côtés des forces françaises, en France et dans dans les pays occupés. Notre propos n’est pas de rentrer dans le détail de chacun des combats, mais plutôt de marquer notre reconnaissance à cette communauté polonaise, installée depuis plus d’un siècle, dans la région stéphanoise. Nombre de ces polonais a combattu dans les rangs de l’armée française, ou dans la Résistance active.
Parmi les adhérents de l’Association Culturelle Franco-Polonaise (ACFP), nous en comptons plusieurs qui ont perdu des membres de leur familles : parents, frères et soeurs, etc…. Il nous est donc paru normal de consacrer un article en leur honneur. Nous rappelons à nos lecteurs qu’il existe dans notre région Loire-Sud, Ondaine et Pilat, de nombreux témoignages de la reconnaissance que la France leur a dédié. Parmi ceux-là, un des tout premier est le monument érigé à la mémoire des jeunes résistants polonais, massacrés par les troupes allemandes dans une clairière située sur le massif du Pilat, tout près de la commune de LA VERSANNE (Loire). Oui, nous devons nous souvenir que des jeunes résistants ont payé de leur vie cette soif de liberté que chaque français souhaitait retrouver en boutant l’envahisseur hors de nos frontières. Comment a-t-on pu aboutir à ce drame de La Versanne ? Que s’est -il réellement passé ? On ne le saura sans doute jamais avec exactitude, sinon que quelques documents publics et quelques témoignages permettent d’en avoir un aperçu. Monsieur Jean-Michel STEINER, historien stéphanois, a réalisé un document très complet grâce à un long et patient travail de recherche dans les archives municipales, régionales, dans les articles de presse des journaux de l’époque, etc. ….
Je remercie tout spécialement notre ami Jean-Michel STEINER, de nous permettre de faire connaître à nos lecteurs, une partie de ses écrits où j’ai volontairement choisi de retenir le récit concernant la fusillade, puis les honneurs rendus. Je voudrais, tout d’abord, faire un petit rappel du contexte dans lequel s’est déroulé, disons-le, ce « massacre ». Il faut savoir que ces jeunes gens, pleins d’ardeur, très volontaires, encadrés par deux adultes, allaient chercher de la nourriture, des vêtements, de l’essence dans les fermes voisines de leur maquis, et cela ne plaisait pas toujours aux paysans locaux. Ces paysans ne comprenaient pas que ces jeunes, malgré quelques maladresses dans leur comportement, risquaient chaque jour leur vie pour eux. C’est la raison pour laquelle ils sont obligés de changer souvent de cachette, au risque d’être repérés. Et il semble que c’est là que se situe l’origine de ce drame .
Voici à présent le récit que fait Monsieur STEINER, basé sur les témoignages et les documents qu’ils a recensés :
…… Conscient des risques qu’il court, le maquis déménage le 16 juillet 1944 pour venir occuper une ferme inhabitée dans une clairière des Grands bois, au lieu-dit les loges de Montheux. Pourtant deux hommes commettent l’imprudence de venir consommer dans la journée du 19 juillet au café de l’hôtel du Grand Bois. Plusieurs dénonciations parviennent à la Kommandantur. Les Allemands bien renseignés, arrivent discrètement selon un cultivateur : « À 9h10 environ, je fauchais lorsque les Allemands sont sortis de la broussaille à 3 mètres de moi. Je me suis alors, sous leurs ordres, replié vers une autre unité de Boches qui étaient là à ma gauche ». La marche d’approche réussie leur permet d’occuper une position dominant la clairière. Profitant de l’effet de surprise, ils ouvrent le feu sur les résistants. Selon le même témoin : « Il y a eu trois fusillés, plus un tué en s’évadant ». Avec un rapport des forces aussi disproportionné la seule solution était le décrochage, mais elle s’avère impossible. Plusieurs maquisards tombent au cours de la fusillade qui dure environ deux heures. Les autres sont faits prisonniers. Un troisième témoin raconte la suite : « Après la bataille, les Allemands ont chargé sur une voiture de bœufs, tout le matériel qu’ils ont trouvé sur les lieux. Puis ils ont fait sauter la maison occupée par le maquis en même temps qu’ils fusillaient les prisonniers faits sur place »………… ……… Sitôt la Libération intervenue, le Tribunal militaire de Saint-Étienne, est saisi de l’affaire. Les interrogatoires durent deux mois, certains témoins devant être recherchés jusqu’à Paris. Le dossier nous a permis de retracer le déroulement du drame. Le rapport final, daté du 10 novembre 1944, insiste sur « les graves responsabilités » qui pèsent sur une dizaine de personnes, toutes françaises. Il révèle la bassesse de certaines d’entre elles : une femme reconnaît avoir, pour 7.000 francs, indiqué la localisation précise du groupe. Le 1er novembre 1945, sur les lieux mêmes du massacre, est inauguré le premier monument. L’ambassadeur de Pologne, ainsi que le chef de la mission militaire polonaise en France, sont alors accompagnés d’une délégation du Conseil municipal stéphanois dont un adjoint au maire, responsable du Front National pendant l’occupation, dont le demi-frère, Jean-Marie BORNE, comptait parmi les victimes……… En juillet 1946, en présence de toute la communauté polonaise du bassin minier la municipalité de La Ricamarie inaugure un monument dans l’enceinte du cimetière. Au sommet d’une stèle de marbre blanc figure l’emblème de la France Libre – la croix de Lorraine dans le V de la victoire – entouré des drapeaux français et polonais. À la base, les noms des vingt maquisards. Au centre une double inscription dans les deux langues : « Aux héros tombés à la Versanne pour votre liberté et la notre. 20-7-1944 ». Aujourd’hui, les actes de décès de chacun de ces jeunes Polonais “inconnus” portent en marge : « Mort pour la France ». Jean-Michel STEINERPour information, sachez encore que le monument commémoratif situé dans le vieux cimetière de La Ricamarie, inauguré en juillet 1946, a énormément souffert des agressions climatiques depuis 66 ans. La ville de La Ricamarie va très prochainement faire procéder à sa rénovation totale. Un prochain article sera consacré à ce monument dès que les travaux seront terminés.